mercredi 26 mai 2010

Encore une lecture passionnante!

Lors des deux jours de formation que j'ai eu le bonheur de suivre avec Madame Danièle Cogis en avril dernier, elle a présenté une quantité de références dont une qui a attiré mon attention. Il s'agit de la présentation d'une recherche participative au CE1 et qui utilise le bricolage pour travailler la grammaire. Je me suis donc procuré la revue Repères no 39 dans laquelle j'ai trouvé l'article de Pierre Sève et Corinne Ambroise «Images, ciseaux, tirettes... un exemple de bricolage didactique au CE1 autour des relations nom/verbe» (2009).



Dans le but de le présenter aux enseignants du premier cycle à qui j'avais à donner une formation, j'en ai fait une synthèse que voici:

Bricolage pédagogique au 1er cycle

Première étape :

8 images proviennent de l’imagier Catégo (Hathier) sont présentées.

Jour 1 :

Les élèves doivent associer pour chaque image des étiquettes présentant les noms communs appropriés sans les détermiants.

Jour 2 :

Les élèves doivent associer pour chaque image des étiquettes présentant les verbes appropriés associés avec les pronoms de conjugaison.

Jour 3 :

Les élèves reprennent leurs réponses collectivement et les placent dans un tableau :

Image 1

Soigne

Chat

Image 2

Roule

Voiture

Image 3

Grimpe

Mur

Image 4

Répare

Garagiste

Image 5

Picorent

Poussins

Image 6

Jaunissent

Feuilles

Image 7

Saute

Fille

Image 8

Brille

Soleil

Quelles différences y a-t-il entre les mots de la première colonne et ceux de la seconde?

Reporter les réponses des élèves dans le tableau :

Verbe

Nom

Ils disent ce qui se passe

Ils disent le nom de ce que l’on voit (des personnages, des animaux, des choses…)

Ils ont –nt pour dire plusieurs

Ils ont un –s pour dire plusieurs

Ils ont des mots outils comme il/ils ou elle/elles

Ils ont des mots outils comme le/la ou un/une

À partir des critères établis, les élèves classent des mots dans une ou l’autre des catégories.

(Ex : poule, arbre, échelle, casserole, revient, pleur, rougissent, etc…)

Deuxième étape

1-

Les élèves sont invités régulièrement à reconstituer des phrases dont les constituants obligatoires ont été séparés. On peut prendre ces phrases dans les livres de lecture de la semaine. On peut prévoir ce genre d’activité sous forme d’atelier.

Idéalement, le verbe devrait faire entendre le pluriel s’il est présent (ex : fait/ font au lieu de court / courent).

Les élèves distinguent ensuite trois catégories de phrases réalisées :

v les phrases possibles (ex : Les petites filles de l’école vont à la danse le mercredi.)

v les phrases imaginaires (ex : Les petites filles pondent des œufs dans leur nid.)

v les non-phrases (ex : *Les petites filles de l’école suit sa mère sur le chemin.)

2-

La consigne est ensuite inversée : les élèves doivent maintenant découper les phrases proposées en groupes obligatoires. Les élèves découpent réellement le papier blanc et recollent les morceaux sur des feuilles de couleur afin de bien faire ressortir la coupure entre les groupes.

Mes amis regardent la télévision dans le salon.

Cette longue histoire est très amusante.

La division des groupes peut ne pas se faire de la même manière pour tout le monde :

1- Le jeune homme trouve un grain de riz.

2- Le jeune homme trouve un grain de riz.

3- Le jeune homme trouve un grain de riz.

Il est important de faire discuter les élèves au sujet des divisions qui ne sont pas identiques. Il n’est pas important d’en arriver à un consensus, mais de noter ce qui ressort des conceptions des élèves.

Par exemple, pour la coupe 1, un élève répondra qu’il y a un suspense : le jeune homme trouve quoi? un grain de riz!

Pour la coupe 2, l’élève répondra que c’est un jeune et pas un vieux.

Pour la coupe 3, l’enseignant peut guider les élèves vers la définition de chacun des groupes : ce dont on parle et ce qu’on en dit, qui reprenent les définitions des fonctions de sujet et de prédicat.

Ce genre de discussion permet de faire entrer l’élève sur la voie de la réflexion sur la langue et de dissocier le contenu des phrases de leur construction.

Troisième étape

Semaine 1 : Présenter une phrase dans laquelle le singulier et le pluriel s’entendent à l’oral.

Ma sœur écrit une lettre.

Ils doivent la segmenter en deux : ce dont on parle et ce qu’on en dit.

Ils inventent ensuite d’autres «ce dont on parle», donc d’autres sujets. Cela donne des phrases, des phrases imaginaires et des non-phrases (comme *mes sœurs écrit une lettre).

Semaine 2 : L’enseignante présente sur deux bandes de papier blanc les mots sélectionnés la veille et les possibilités de prédicat. Elle insère «une longue bande de papier horizontale où des fentes ont été ménagées qui déterminent des fenêtres, de sorte qu’elle peut y insérer comme dans un tissage et y faire glisser verticalement les premières affiches…» (Sève et Ambroise, 2009, p. 116).

Les élèves composent alors des phrases possibles ou imaginaires à partir des énoncés présents sur les bandes verticales. Plusieurs phrases auront été prévues.

Semaine 3 : L’enseignante propose le même matériel mais sur lequel elle n’écrit que le sujet et le verbe. Le complément se retrouve sur la languette horizontale.

Les élèves font rapidement les observations concernant les marques du pluriel comme étant différentes sur les bandes «ce dont on parle» et sur les bandes «ce qu’on en dit». On peut alors préciser aux élèves les termes officiels : sujet et prédicat, nom et verbe.

Réinvestissement

Au fur et à mesure des leçons présentées, on peut diviser les mots selon les classes de mots et en faire plusieurs bandes verticales.

Référence : Pierre Sève et Corinne Ambroise. (2009). «Images, ciseaux, tirettes… Un exemple de bricolage didactique au CE1 autour des relations nom/verbe» dans Repères. No. 39, p. 103 à 123.

Évidemment, l'aspect visuel du bricolage et des tirettes est bien illustré dans l'article que je vous invite à vous procurer. J'en ai moi-même fabriqué un prototype que les enseignants ont apprécié. Elles m'ont dit qu'elles avaient même envie de tenter l'expérience avec les élèves.

En fait, ce que j'apprécie de ce genre de projet, c'est qu'il amène les élèves à manipuler concrètement. Quand ils découpent, collent et tirent les languettes, ils s'approprient dans leurs gestes des concepts abstraits que sont les classes et les fonctions des mots. Un peu à la manière de la Grammaire en 3D de Brigitte Dugas.

Bonne lecture!

lundi 10 mai 2010

Une nouvelle lecture inspirante

Je reviens à l'intention de base de mon blogue afin de partager une lecture vraiment éclairante.

Il s'agit de l'article «Connaissances déclaratives et procédurales: discussion d'un contraste dans le travail grammatical» de Boivin dans Langage, objets enseignés et travail enseignant (2009).

Elle analyse deux interactions d'un élève de 8e année de la Suisse romande au sujet de la reconstruction de subordonnées relatives en phrases de base. Elle démontre que l'élève tente de confronter son intuition grammaticale à la phrase erronée mais institutionalisée par l'enseignant. Les connaissances déclaratives de l'élève sont déficientes, mais ses connaissances procédurales (les manipulations syntaxiques) viennent à son secours pour lui permettre d'exprimer son désaccord.

Boivin suggère donc en conclusion que «les enseignants devraient porter une attention particulière aux manipulations syntaxiques dans le travail grammatical en classe. En effet, les manipulations peuvent s'avérer un moyen pour l'élève d'exprimer ce qu'il sait alors que les mots lui manquent: son savoir procédural peut ainsi combler les lacunes dans son savoir déclaratif et lui permettre de s'exprimer.»

J'ai ici un nouvel argument pour convaincre des enseignants de la nécessité de travailler les manipulations syntaxiques avec les élèves et d'exploiter des jugements de grammaticalité des élèves. De plus, cet article montre bien l'importance de la planification pour les enseignants et de présenter aux élèves des phrases dont on est sûr de la construction afin d'éviter (ou de favoriser) ce genre de réflexion métalinguistique.

Pour conclure, je peux dire que j'apprends moi-même qu'il existe des subordonnées relatives à vide parasite! C'est fascinant!

vendredi 23 avril 2010

Sixième rencontre du club vidéo

Drôle de première impression que je garde de cette rencontre...

Je crois qu'elle s'est bien déroulée, mais je n'en ressors pas plus emballée qu'il faut. Pourquoi?

Peut-être parce qu'il n'y a pas eu autoscopie comme c'était prévu. Le manque de temps n'a pas permis le tournage. Aussi, le manque de volontaires a fait en sorte que l'enseignante disposée à se filmer n'a pas eu le temps de le faire. Mais si quelqu'un d'autre avait voulu, ça aurait été possible... Bref, l'autoscopie a ralenti les choses.

De plus, la dernière autoscopie a failli me faire perdre un membre: le malaise à commenter un pair a déstabilisé quelqu'un que j'ai réussi à convaincre de revenir en proposant une vidéo publiée. Avant la rencontre, j'ai eu la chance de discuter avec cette personne pour questionner son malaise. Elle m'a dit que les relations dans l'équipe n'étaient pas au beau fixe et elle s'était sentie dérangée par certaines attitudes de défense de collègues. Alors il ne s'agit pas que de mon animation (je m'attribue une partie du blâme), mais du climat d'école qui règne et sur lequel je n'ai pas de pouvoir.

Autre raison qui me fait douter de la portée de ce club vidéo: l'épuisement des ressources vidéo en grammaire et syntaxe, surtout pour le secondaire. J'ai laissé le choix de deux vidéos: la découverte de règles orthographiques (pour l'induction) et la dictée coopérative (pour les interactions entre élèves). Le groupe (enfin... le groupe influencé par les orthopédagogues) a choisi de commenter l'orthographe. Je me sens définitivement plus à l'aise en grammaire...

J'ai repris mon habitude de commencer par demander ce qui avait été mis en pratique depuis la dernière rencontre. Ce sont des connaissances qui ont émergé: une enseignante avait bâti une démarche au sujet de l'accord du participe passé. Elle dit avoir appris des manipulations dans la formation en grammaire et les avoir réinvesties dans cette démarche.

Je ne suis pas vite vite pour commenter ce genre de démarche. De plus, comme je voulais m'efforcer de m'effacer dans cette rencontre, je ne me suis pas prononcée, mais plus j'y repense, plus je me dis que ce genre de procédurier cloisonne encore des savoirs dans des silos; l'élève ne comprend toujours pas la structure de la phrase: il l'analyse encore mot à mot. Les élèves confondent tous les sons en é avec des participes passés. Les mots «escalier» ou «farfelu» deviennent des participes passés. Comment faire pour les amener à comprendre l'ensemble de la phrase et l'organisation des groupes pour éviter de confondre les classes de mots? Je crois que le procédurier (la démarche en plusieurs étapes) sert à une personne qui a une connaissance finie et achevée d'une notion, mais pas à un apprenant. Quel genre de question aurais-je pu poser pour les amener à le voir autrement? Je leur ai cependant demandé pourquoi les élèves étaient mêlés à ce point (pour confondre toutes les classes de mots)!? La réponse qu'ils m'ont servi m'a un peu déçue: ils m'ont dit que ce ne sont pas tous les élèves qui ont de la difficulté et que pour la plupart, ça va! Ils ont minimisé la dificutlé. Alors pourquoi cet acharnement à régler les participes passés avec tout le monde??? Calmons-nous... Voilà pour la partie des premiers échanges.

Nous avons démarré la vidéo de Natasha Lareau (sur le site de Zoom) qui présente des mots d'orthographe et qui demande aux élèves de relever la règle. Quatre discussions ont émergé.

D'abord, la pertinence de travailler par induction. Certains mentionnent le faire déjà à l'occasion et ils remarquent que les élèves sont plus actifs, que ceux-ci voient mieux la pertinence d'apprendre ce qu'ils découvrent. Nous sommes restés en surface de ce thème. J'aurais aimé être mieux préparée à les renvoyer à l'organisation des connaissances pour les élèves et pour l'enseignant. Je leur ai quand même demandé comment il était possible d'enseigner ce genre de connaissance et quand ils m'ont relancée sur d'autre manières de faire, je leur ai demandé de patienter à la prochaine capsule de formation. Ça fait drôle, quand même de ne pas répondre tout de suite. Mais ils savent qu'ils vont obtenir leur réponse...

Ensuite, nous avons discuté de la différence entre enseigner (et faire apprendre) des mots d'orthographe versus enseigner une règle orthographique pour en arriver à la conclusion implicite que les deux sont nécessaires: une règle accompagnée de mots, car une règle toute seule ne sert à rien (n'est pas transférée) et des mots seuls sont trop faciles à «empiler» et être oubliés.

L'aspect de la différenciation des mots à l'étude a fait réagir aussi: il est inutile de faire étudier des mots qu'un élève sait déjà! Surtout si on les contrôle tous à la fin de la semaine. Mais on voit donc que le plan de travail différencié n'est pas monnaie courante. Je n'ai pas beaucoup poussé là-dessus non plus et je pense que j'aurais pu questionner mieux aussi (mais comment?).

Enfin, la question du secondaire s'est posée. À ma question: est-ce pertinent pour le secondaire d'enseigner des mots d'orthographe ? la réponse a été spontanée: ben oui! Mais une question a été posée plusieurs fois: est-ce qu'au secondaire, ça devrait être fait?, question à laquelle je n'ai pas répondu directement. J'avais le goût de renvoyer l'enseignant au programme de formation, chose que je n'ai pas osée. C'est un peu sec. J'ai plutôt demandé s'il jugeait que ses élèves en auraient besoin... Il m'a répondu oui.

Finalement, le contenu de la règle orthographique de la vidéo a mis une orthopédagogue en conflit cognitif: l'enseignante de la vidéo indique aux élèves qu'il faut séparer les syllabes des mots pour savoir si le son è termine la syllabe ou non. S'il est suivi d'une consonne à la fin de la syllabe, alors il le e ne prend pas d'accent. Mais il s'agissait ici de syllabes écrites et non orales comme utilisent les orthopédagogues. Pour l'une, cette précision ne faisait que lui apporter une nuance à sa pratique. Pour l'autre, son visage semblait montrer sa confusion... C'est cet aspect didactique et linguistique que j'aime toucher, mais comme l'orthographe n'est pas ma spécialité, je me sens moins en contrôle pour guider les discussions.

Somme toute, je crois que nous avons eu une belle et bonne rencontre; nous n'avons pas même pas eu le temps de regarder la vidéo au complet. Elle a permis aux enseignants de réfléchir à leur pratique, d'en discuter, mais je crois que je cherche encore mon rôle et ma place au centre de toute cette animation pour en tirer toute la richesse possible. Je cherche comment animer, je cherche comment alimenter la discussion par des aspects plus théoriques, pédagogiques, linguistiques, etc. Voilà! Je patauge un peu, là!

mardi 30 mars 2010

La première autoscopie: mes commentaires

Je revisionne à l'instant le club vidéo de cet après-midi, car pour la première fois, j'ai besoin de revoir pour juger de ce qui s'est passé. Je dois mentionner aussi que vendredi dernier, j'ai donné une journée complète de formation en grammaire actuelle à ces enseignants (et une trentaine d'autres). J'y fais référence au cours du club vidéo.

J'ai commencé par rappeler l'intention de la rencontre pour mettre tout le monde à l'aise, rappeler que je voulais des interventions au sujets de la grammaire et non de la gestion de la classe (mais peut-être que j'influence trop les commentaires et que je n'aurais pas dû diriger? Note à moi-même: je suis confuse entre ma recherche et mon travail. En faisant mon travail de cp, je pense que je dois préciser ce genre de consigne. En faisant mon travail de recherche, je sens que je dois m'effacer et laisser libres les enseignants de commenter ce qu'ils voient pour éviter de les diriger et ainsi voir - analyser leur progression, leur vision changer de direction (ou non).). J'ai enfin précisé que mon rôle était de nourrir les discussions mais pas de me positionner et intervenir au même titre qu'eux (ce que je n'ai pas toujours fait...).

Le cours que l'enseignante et l'orthopédagogue ont présenté portait sur la procédure d'accord entre le sujet et le verbe. Les élèves trouvaient le verbe par des manipulations, puis trouvaient le sujet par des manipulations et enfin, s'exercaient à faire les bons accords. L'ensemble de la leçon était plutôt magistral. J'ai été surprise que certains enseignants du groupe club vidéo aient appris des manipulations à l'écoute de cette vidéo, par exemple, que le verbe s'encadre par ne... pas. C'était d'ailleurs la première intervention, sur le contenu plutôt que sur le comment.

Le 2e arrêt a porté d'abord sur une anecdote de tournage, mais j'ai profité de la pause pour questionner les enseignants. Des interventions très à propos ont émergé au sujet de la reformulation de l'orthopédagogue et sur l'utilisation d'un exemple-non pour montrer que la manipulation de l'encadrement se fait sur un verbe uniquement et pas une autre classe de mot (ici, le nom «décor» qui, dans un autre contexte, peut devenir un verbe ex:«je décore».) J'ai alors rappelé de réaliser les manipulations dans le contexte de la phrase. Aurais-je dû ajouter ce commentaire?

L'arrêt suivant a porté sur un exemple où l'encadrement par ne ... pas ne fonctionne pas: le temps composé qui n'encadre que l'auxiliaire. L'exemple n'était pas volontaire, mais néanmoins brillant, ce que je n'ai pu m'empêché de féliciter. Puis, une autre enseignante a demandé ce qu'il fallait faire pour aider les élèves à passer par dessus cette difficulté. J'ai pensé à leur renvoyer la question et mettre à profit les connaissances de tous pour y répondre. Mais j'ai encore mis mon grain de sel dans la réponse...

Un questionnement est survenu ensuite sur la notion de «mot d'action» pour désigner le verbe. L'intuition ici portait sur un doute entre ancienne et nouvelle grammaire. Je ne me suis pas mouillée ici, j'ai renvoyé les questions, mais il aurait peut-être fallu que je valide? À réécouter l'extrait, je ne crois pas, finalement: ils s'en sont fort bien sorti.

J'ai voulu ensuite attirer l'attention sur un autre extrait, mais je n'ai pas positionné le curseur au bon endroit et un enseignant a relevé autre chose: la phrase de base = sujet, verbe, complément. Il a parlé de la notion de groupe, et le mot complément tout seul qui pouvait renvoyer au verbe ou à la phrase. Puis, quelqu'un d'autre a parlé de prédicat. Un très bel échange a suivi à propos du libellé de la phrase de base. Mais, il a encore fallu que j'ajoute mon grain de sel... J'ai précisé qu'on parle d'un groupe sujet de la phrase (et non du verbe), d'un groupe prédicat de la phrase et du complément de la phrase. J'ai heurté des représentations avec cela... «Et si la phrase a plusieurs verbes?», question à laquelle j'ai - nous avons répondu qu'il fallait défaire toutes les phrases en phrases simples qui n'ont qu'un seul verbe conjugué. Et j'ai rappelé l'exercice de la semaine précédente: Mais qu'est-ce qu'une phrase? exercice qui n'avait pas été très apprécié des enseignants du secondaire. J'étais contente ici de pouvoir justifier la pertinence d'un tel exercice. Encore une question sur la grammaire traditionnelle: la notion de proposition à laquelle j'ai répondu d'office, sans réfléchir à renvoyer la question. Finalement, j'ai occupé le plancher pas mal :( Nous avons terminé l'échange sur le nécessité de reconstruire les phrases de base (l'affiche que j'avais pensé sortir et placer au tableau), reconstruction qui peut être considérée comme un outil de travail, au même titre que les manipulations.

Les enseignants se sont questionné sur leur changement en cours d'année. Est-ce que je dois introduire la notion de prédicat, les manipulations, la phrase de base au mois de mars ou je dois attendre septembre prochain? Je les ai laisse discuter. Plus tard, le sujet est revenu et ils ont dit qu'ils se sentaient à l'aise de dire aux élèves qu'ils suivaient des formations et qu'ils allaient expliquer autrement désormais pour certains éléments plus faciles à intégrer.

Un commentaire est venu sur la manipulation de l'encadrement du sujet par c'est... qui. Des élèves ont répondu utiliser C'est qui qui...? Le fameux Kiki qui revient! Belle dérive!

Une autre limite de l'encadrement du verbe par ne ...pas a été amenée (involontairement) par les enseignantes: la présence d'un pronom devant le verbe. L'élève qui encadre dit ceci: «des cuisines, une odeur nous ne parvenait pas...» et quelqu'un demande «ça se dit?». Belle colle! J'ai réussi, je crois, à relancer la question: j'ai demandé pourquoi l'élève pose cette question et j'ai référé aux travaux d'Isabelle Gauvin sur les intuitions grammaticales des élèves. J'ai demandé aux enseignants ce qu'ils feraient pour expliquer cela aux élèves: une idée d'affiche a émergé...

Le débat s'est poursuivi sur la procédure pour trouver un sujet: la question qui est-ce qui peut continuer si elle est efficace pour l'élève, en plus des manipulations enseignées. C'est le constat des enseignants. Ils ont aimé la phrase inversée pour montrer que le réflexe est de regarder à la gauche du verbe pour trouver le sujet, mais le c'est... qui fonctionne mieux.

En réécoutant, je m'aperçois que j'ai manqué une ouverture au sujet du mot d'action: un enseignant argumente que l'élève comprend que «des cuisines» n'est pas le sujet parce qu'il ne fait pas l'action de parvenir. Or, dans une phrase passive, le sujet grammatical de la phrase ne fait pas l'action non plus... raison pour éviter de parler de mot d'action. Flûte...

L'extrait suivant a peut-être été trop dirigé... Ils ont cherché à savoir ce que je voulais qu'ils disent plutôt que de faire des observations. Re-flûte. Un élève lève la main pour répondre que le verbe est «aviez». Or, le verbe est «aviez photographié». Il n'a donc pas compris l'explication précédente au sujet des temps simples et composés. Personne ne relève l'erreur. On ne sait pas s'il a compris ou non et on n'intervient pas avec lui. J'ai posé la question suivante: est-ce que c'était clair pour les élèves que le verbe était «aviez photographié»? Réponse: pour la plupart. J'ai reprécisé plus tard par une autre question: «a-t-il compris pourquoi le verbe n'est pas «aviez»?» Et j'ai répondu moi-même à ma question... Re-re-flûte... Peut-être que les orthopédagogues, qui étaient absentes à cette rencontre, auraient identifié ce que je voulais avec leur lunette d'élèves en difficulté.

Pour finir en beauté: une discussion sur le retour au contexte de la phrase pour faire les manipulations (Yé! Ça s'intègre!), la difficulté du sujet «tout le monde» à la 3e personne du singulier, vs on-nous. Et dernier échange sur l'exercice proposé de repérage d'erreurs qui demande aux élèves une démarche complète de la procédure enseignée. Encore dirigé et commenté par ... ben oui, moi. (Mais pour ma défense, cette fois-ci, le temps était dépassé et j'ai voulu accélérer...)

Ça ne se bouscule pas aux portes pour la prochaine autoscopie. J'espère avoir un autre volontaire.

lundi 29 mars 2010

Vers la première autoscopie

Demain aura lieu la première rencontre dont la vidéo provient de la classe d'un participant au club vidéo. Je trouve que cela augmente le niveau de difficulté pour l'animatrice, car après un premier visionnement chez moi, dans le confort de mon bureau, je m'aperçois que j'observe plein de choses, plein d'interactions, plein d'éléments didactiques et pédagogiques dont j'aimerais parler, mais il ne faudra pas que je le fasse. Même par questions détournées.

Je crois que, demain, je devrai me positionner en facilitatrice d'échanges tout simplement. Je devrai m'assurer que chacun prenne la parole dans le respect, que chacun pose des questions et arrive à formuler des réponses, tout cela sans que l'enseignante qui a filmé son groupe se sente jugée par ses collègues ni par moi. Je ne crois pas que ça arrivera, mais je veux demeurer vigilante. Le but sera de discuter autour d'un problème commun: ici, la vidéo sert de base à l'échange (je me pratique à dire ça, pour demain :) ) Il ne s'agit aucunement d'une évaluation et je sens que je me trouve dans cette fâcheuse posture... Je devrai m'en défaire d'ici demain.

Les deux enseignantes qui ont filmé la leçon ont sélectionné des extraits qui m'apparaissent intéressants, mais d'autres extraits sont ressortis lors de mon écoute intégrale de la période. Peut-être que si je montrais ces bouts «coupés au montage», ce serait mon commentaire éditorial? Ce serait une manière d'attirer l'attention sur ce qui me dérange ou me plait et dont on peut discuter. .. Mais je trouve cela risqué de me mettre les pieds dans les plats... mmm j'y pense encore...

Les enseignantes ont aussi tourné la vidéo en positionnant une caméra fixe vers les élèves (certains élèves), de sorte qu'on ne voit ni les enseignantes, ni le tableau, ni les phrases, ni les feuilles. Je trouve difficile d'observer le travail des enseignantes que je ne vois pas, mais au fond, je peux considérer que j'ai quand même leur point de vue : les élèves. Or, je suis certaine que l'aspect «gestion de classe» va ressortir dans les commentaires (un tel regarde l'heure, une telle fait autre chose), alors que ce n'est pas l'objet de discussion qui m'intéresse. Est-ce que je devrais orienter les discusisons dès le départ? Je veux que vous parliez de grammaire? Dois-je être aussi directe?

J'ai quand même bien hâte à demain pour vivre cette première autoscopie. Je vous en donne des nouvelles demain!

mercredi 24 février 2010

4e rencontre du club vidéo grammatical

Voilà un club vidéo comme je l'imaginais! Nous sommes parvenus à entrer dans une micro analyse de la grammaire actuelle! Je vous raconte!

Dans un premier temps, j'ai resitué l'ensemble des rencontres du club vidéo dans l'année. Il en reste donc trois: mars, avril et mai, des autoscopies. Et un post test. Ça a fait du bien aux enseignants de se souvenir de la séquence.

J'ai demandé ensuite de nommer ce dont ils se rappelaient de notre dernière rencontre. Ils ont rappelé les manipulations et, ce qui m'a surpris, le fait que personne ne les utilisait comme il faut. Ils ont rappelé leurs difficultés avec toute la grammaire actuelle et leur besoin de formation. Nous aurons donc, le 26 mars prochain, une formation plus formelle sur la grammaire actuelle (la formation présentée dans le cadre du cours sur les pédagogies actives). Ils ont ensuite rappelé la vidéo de l'élève: un enseignant pose des questions. Nous avions eu tellement peu de temps pour la regarder que je crois qu'il était normal qu'ils aient oublié.

Nous avons donc revu les trois premières minutes où l'élève fait les manipulations dans le contexte de sa phrase. Après chaque arrêt, nous avons discuté de ce que ça implique. Les lacunes en grammaire actuelle se faisait sentir.

Par la suite, j'ai hésité à présenter les activités suivantes. En fait, je ne savais plus dans quel ordre les présenter. L'interaction idéale ou la vidéo? Comme ils m'ont vu bafouiller, je les ai laissé choisir. Deux contre deux, j'ai tranché: la vidéo d'abord. (En fait, ils étaient cinq ce soir. Depuis le début de l'année, j'ai perdu deux participants, peut-être trois. C'est la vie!) Ils ont bien vu que l'enseignant essayait d'amener l'élève vers la réponse, mais que les réponses du jeune garçon montraient qu'il était tout mêlé. Assez rapidement, une enseignante est parvenue à mettre le doigt sur le bobo: l'enseignant devait revenir à la phrase de base. Il a fallu cependant qu'elle explique aux autres pourquoi elle en arrivait à cette conclusion.

J'aime beaucoup cet aspect du club vidéo: il laisse place à la compétence des enseignants et au partage de l'expertise. Plutôt qu'être l'unique point de référence, le cp partage et surtout délègue son expertise. C'est un point de vue que j'aime beaucoup, parce que je n'ai jamais prétendu en savoir plus :) Ça me fait penser au groupe de discussion proposé par Giasson dans lequel l'enseignant se trouve au centre du groupe. Les échanges passent par lui mais n'émanent pas de lui ni n'arrivent à lui.

Après avoir discuté autour de ce que demandait l'enseignant, ce qu'il aurait pu dire en conformité avec la grammaire actuelle, j'ai proposé l'interaction idéale. Au verso, je leur ai proposé d'écrire une autre interaction avec une phrase, mais uniquement de dire comment il fallait faire l'exercice grammatical s'est avéré un échange engageant. Je m'en suis tenue à cela.

Finalement, nous n'avons pas vu les dernières minutes de la vidéo par manque de temps: de toute façon, la conversation a tourné autour de la pédagogie. Les enseignants ont été surpris d'abord de constater qu'un enseignant puisse prendre quinze minutes avec un seul élève et que les autres travaillent (ou ne dérangent pas...) Nous avons parlé de la pédagogie par ateliers. Ils ont aussi remarqué que l'enseignant de la vidéo questionne bien l'élève et il cherche à faire émerger la réponse de l'élève. Cependant, ils ont qualifié d'acharnement les détours pris pour trois phrases... Un enseignant du groupe a avoué avoir tendance à donner la réponse à l'élève, lui dire : «tu comprends, là, hein!» et savoir que ce n'est pas vrai, mais renvoyer l'élève à sa place... Le premier pas est fait vers le changement: il nomme une difficulté.

Prochain club vidéo: une autoscopie! J'ai hâte! Ce n'était pas clair pour les enseignants ce qu'ils devaient montrer. J'ai redis que la vidéo est un prétexte pour discuter. C'est une manière de soumettre un problème au groupe et de discuter tous ensemble d'une même séquence, sans être physiquement dans la classe de l'autre en temps réel. Que ce soit une belle leçon en grammaire actuelle ou une leçon traditionnelle, ça importe peu. Les premiers volontaires vont quand même essayer de construire une belle leçon, sans mon aide! Le défi, lors de la prochaine rencontre, sera de les laisser discuter et de ne pas trop diriger par mon questionnement. Par contre, je crois qu'ils auront besoin d'une certaine validation et se faire pointer les éléments à améliorer. Il faudra que je me garde une réserve...

jeudi 28 janvier 2010

Un p'tit v'lours

J'ai travaillé dans un autre contexte avec une enseignante qui participe à mon club vidéo de grammaire. Elle a mentionné que c'est le club vidéo qui a fait le plus bouger les pratiques des enseignants dans la classe et ce, depuis plusieurs années. Elle voit une différence majeure entre avant et après les rencontres. Je n'ai malheureusement pas eu le temps de lui demander pourquoi, selon elle, le club vidéo était si efficace. Mais dans les post entrevues, je n'y manquerai pas. Nous en sommes à la moitié... J'ai hâte aux autoscopies!

Ah! Quand même, ça fait du bien à entendre!!! C'est bon pour le SEP!